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(fr) Creative flow est un blog dans lequel j’explore le processus créatif. J’en ai besoin pour avoir plus de force dans mon travail, repousser mes croyances limitantes et juste laisser tout ce flow créatif sortir de moi. Et peut-être aider - ou au moins inspirer- d’autres personnes à en faire de même !

(eng) Creative flow is a blog where I explore the creative process to get more strength in my work, let fall the boundaries I got to let the flow just go. And maybe help -or at least inspire- others to do the same !

Je suis la guerre

Je ne sais pas ce qu'il se passe en moi depuis la nouvelle lune de février, mais c'est le tsunami à l'intérieur, le tremblement de terre, les sept plaies d'Egypte, l'apocalypse. Des vagues énormes déferlent et rasent tout sur leurs passages : les arbres, les maisons, les immeubles, les gens. Des mitraillettes dans les deux mains, j'avance comme godzilla et je tire sur tout ce qui bouge. Je sors les bombes, les kalachnikovs, les mines antipersonnelles, je dégomme tout. Les forêts, la biodiversité, les animaux, les hommes, les femmes, les enfants. Tout. Comme les gamins qui piétinent les châteaux de sable en regardant pleurer leurs petits camarades, j'écrase les villes, je les raye de la carte en une pitchenette, jusqu'à ce qu'il n'y en ait plus aucune. J'ai envie de dégommer mes ami.e.s, réduire mon appartement en miette, tout exploser en bombe atomique. Hiroshima dans mon quartier. Je n'ai jamais ressenti autant de violence en moi. Pourtant je me suis souvent sentie sur le fil ténu entre la raison / la folie ; la lucidité/ la démence ; la gentillesse/ la cruauté. Comment faisons-nous en tant qu'êtres humain.e.s pour nous contenir ? Comment se fait-il qu'il n'y ait pas plus de guerres ? Comment faisons-nous dans nos jolis pays pour être si peu nombreu.se.x à nous laisser aller à nos pulsions ? En m'asseyant sur mon canapé ce soir, avec ce sentiment effrayant d'être sur le fil, je me suis dit qu'au lieu de fuir cette noirceur qui m'envahissait et d'essayer de la contrecarrer à coups de ballons roses et mantras tendres, j'allais la regarder franchement.

Oui, à l'intérieur je suis une bourreau, une dictatrice, un être aux pulsions effrayantes.

En cet instant je comprends les guerres, les assassin.e.s, et les besoins nerveux de jouer aux jeux vidéos, regarder des films d'horreur ou se défouler avec un sm52. Je comprends, car j'ai ça en moi. Moi, la soit-disant gentille fille, pleine d'empathie, de bienveillance, je peux vous dire que je suis un être absolument ignoble à l'intérieur. Écrire ces mots me fait peur avec l'idée de "ah tu vas créer ce que tu écris !!!" et "ah que vont-ils.elles dire de moi ?". En même temps, je suis persuadée que toutes ces pulsions humaines que nous refusons de voir en nous-mêmes doivent sortir, se dire, s'écrire, s'exprimer. Plutôt que de s'offusquer ou se révolter que quelqu'un.e les exprime a notre place et d'en faire un.e monstre, admettons tou.te.s ensemble que nous avons ces pulsions destructrices en nous. Non ! Nous ne sommes pas pur.e.s et immacul.é.e.s. Quelque part, à un moment donné, nous violentons, nous tuons, nous répandons le sang. Nous jouons les hypocrites alors que nous sommes tou.te.s les mêmes.

J'avais récemment envie d'écrire sur notre animalité. Je nous voyais comme des animaux qui essaient de se faire croire qu'ils sont autre chose : en s'habillant, en se rasant, en construisant des abris sans trace d'animal ni de végétal, en considérant ce qui vient de la terre comme sale (la boue, les insectes, les cailloux, les champignons...), en édictant des lois qui considèrent nos pulsions comme dangereuses : nos pulsions sexuelles ou violentes.

Et si c'était justement en acceptant pleinement nos pulsions destructrices que l'on arrêtait les guerres ? En leur laissant la place ? En leur offrant un cadre pour s'exprimer, se vivre pleinement sans jugement ? Comment créer des espaces où cela peut exister ?

Au théâtre, j'aime que la scène soit un lieu où l'on peut voir et explorer toutes ces parts humaines que l'on contient au quotidien, où l'on peut décider de jouer ou regarder le bourreau, la victime, le vainqueur, l'oppresseur, l'esclave, l'héroïne. Pour nous rappeler que nous sommes cela et par là même accueillir pleinement notre seconde polarité : notre lumière, notre bonté, notre amour inconditionnel.