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(fr) Creative flow est un blog dans lequel j’explore le processus créatif. J’en ai besoin pour avoir plus de force dans mon travail, repousser mes croyances limitantes et juste laisser tout ce flow créatif sortir de moi. Et peut-être aider - ou au moins inspirer- d’autres personnes à en faire de même !

(eng) Creative flow is a blog where I explore the creative process to get more strength in my work, let fall the boundaries I got to let the flow just go. And maybe help -or at least inspire- others to do the same !

Je n'arrêterai pas tant que je n'aurai pas tout donné

Je n'arrêterai pas tant que je n'aurai pas tout donné

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Pour être honnête, je n'ai pas encore tout fait pour ma pièce. Certes, j'ai réussi à la jouer dix fois entre mai 2022 et octobre 2023. Dix fois en un an et demi, c'est déjà pas si mal pour une première pièce, alors que j'étais pétrie de doute en 2023 et que j'étais sur le point de tout arrêter. Mais aujourd'hui, avec la confiance que j'ai gagnée, je sens que je ne suis pas allée jusqu'au bout. J'ai douté, j'ai pleuré, j'ai quand même saisi mon téléphone, j'ai rencontré alors que j'étais tremblotante. Et je suis allée jouer, alors que c'était challengeant, dur, dur, vraiment.

Mais je n'ai pas encore tout donné.

Je n'ai pas encore tout donné pour pouvoir dire : "ça ne marche pas la diffusion". Je n'ai pas encore envoyé le projets à toutes les personnes et toutes les structures à qui je souhaite le proposer. Je pourrai me réfugier derrière le placard du salon, et me dire que ce que j'ai fait jusqu'à aujourd'hui est suffisant. Assise contre le mur, contre mon petit trou de souris, je pourrais rentrer dedans et hiberner pour l'hiver avec mon petit morceau de gruyère suisse. Mais je n'ai pas encore tout donné.

Il y a quelques jours j'ai passé une nuit en pointillés. L'impression de ne pas dormir et d'enchaîner des sessions de rêves à n'en plus finir, entrecoupés de réflexions. Je ne sais plus ce qui était du domaine du conscient ou de l'inconscient mais toujours est-il que je me suis revue à Paris, dans ma coloc des Rigolots, assise dans mon mini salon, avec cette allée en chantier que je devais enjamber pour rentrer dans la maison. Je me souviens des jolis projets que j'écrivais sur mon clavier entre les appels téléphoniques du SVP40000 au sous-sol de la Société Générale, à La Défense. Un job d'hôtesse.En entrant dans le bâtiment, j'avais trouvé ça prestigieux. La tour en verre de la Société Générale, elle claque avec son grand hall digne de Wall Street.Et puis, après les portiques de sécurité et les grands ascenseurs, je m'étais retrouvée en sous-sol dans une salle avec quatre autres personnes blasées, chacune face à son ordinateur. "SVP 40000 bonjour !". "Oui, bonjour ! Il manque du papier toilette aux WC femmes du 19ème étage." "Très bien, je transmets au service concerné". Je cherche dans le logiciel : Intervention > service hygiène > remettre du papier toilette. Envoyé ! "SVP 40 000 bonjour !" "Bonjour, c'est vraiment infernal, la clim de l'open space du 8ème ne fonctionne plus, c'est pas possible d'avoir un système aussi défaillant en temps de canicule !!! Qu'est ce que vous foutez ??? " "Très bien, je contacte le service concerné". "Service climatisation bonjour, pourriez-vous intervenir au 8ème pour un soucis de clim dans l'open space ? Ah, vous êtes en maintenance pour deux jours. Ah d'accord, zut, c'est noté."

Purée, j'aurais tellement dû écrire les conversations, ça aurait fait de ces sketchs !!! Bref, donc, je repensais à Paris et moi au SVP400000 de la Société Générale. Assise face à mon logiciel, je n'avais pas accès internet (hormis Google map, alors je me suis aussi mise à explorer le monde sur Google Map !!!)

Entre les appels j'en profitais pour bosser sur mes projets. Combien en ai-je écrit sans jamais les réaliser ? Il y avait cette création sonore autour de ma 1ère expérience transcendentale de retraite de méditation Vipassana. Je l'avais proposé à France Culture, j'avais même posé un beau dossier sur le bureau d'une réalisatrice. On m'avait finalement dit de le transmettre à quelqu'un.e d'autre. Je ne l'ai jamais fait. Et ce documentaire sur les bonzaïs du Parce Floral du Bois de Vincennes. Je voulais faire une création vidéo sensible sur la communication avec les arbres. Je n'ai jamais rien monté. Pourtant, je suis allée au Parc, j'ai rencontré le responsable, j'ai discuté avec lui, j'ai demandé des autorisations de tournage à la ville de Paris, j'ai filmé les bonsaïs, j'ai même demandé à un ami de m'aider pour la prise de son. Et puis quoi ? Rien. (oaw, au moment où j'écris j'entends : "Avoir confiance en soi et ne jamais se décourager !" dans une chanson de Daniel Dimbas et Palms Trax). En tous cas, pas grand chose. Des rushs jamais sortis de mon ordi, des mots, des mots, tapés encore et encore, enfouis à jamais dans un vieux disque dur. Mon trou de souris tout confortable, j'y avais sûrement mis des coussins et de quoi me faire du thé chaud pour ne pas en bouger.

D'ailleurs, à cette époque je préférais me réfugier contre les autres, bien au chaud, sous la couverture partagée. "Les projets des autres sont plus fiables, plus intéressants, mieux ficelés, plus aboutis, vraiment pertinants, c'est clair !!!", me disais-je. Peut-être est-ce simplement que ces personnes croyaient plus à leurs projets que moi aux miens ?

D'ailleurs je me disais souvent "ah, mais je pourrais faire pareil, même faire mieux !!!" "Mais tu attends quoi ?" (Bon, je caricature un peu car je réalise que j'ai quand même réalisé mon premier court-métrage de fiction et une création sonore interactive à Paris à cette époque.) Mais j'aurais pû faire vraiment mieux. Je ne suis pas sûre d'être allée jusqu'au bout, jusqu'à ce moment où je me serais dis, "J'ai vraiment tout donné pour ce projet, je l'ai pleinement honoré, maintenant je peux passer à autre chose !" Non, à la place, j'ai rejoint un groupe d'écolos super sympas et tourné des vidéos autour de la permaculture humaine. C'était méga cool et confortable de suivre l'envie des autres, et ça m'a quand même amené à des trucs de ouf. Mais ce n'était pas mon projet.

Ce soir là, quand j'ai enchaîné les cauchemars, j'ai eu envie de prendre dans les bras et consoler cette Hélène qui ne croyait pas du tout en elle. De lui faire un gros câlin et de l'encourager. Ses projets étaient si beaux, si sincères, si profonds, que j'en ai les larmes aux yeux. Je dirais même "et si nécessaires au monde". Je me suis dit que c'était vraiment du gâchis. Comment se fait-il que nous croyions si peu en nous-mêmes alors que nous avons tant de choses merveilleuses à apporter au monde ???

Aujourd'hui, je suis fière de moi car c'est vraiment la première fois avec "La femme parfaite" que je dure aussi longtemps avec un projet qui émane de moi (et pour moi, c'est un graos mprojet) ; que je tiens le coup malgré les doutes et les grosses périodes de déprim (j'en ai eu une bonne l'année dernière, je peux vous le dire !). Mais je sais que je n'ai pas encore tout donné. Je sais que j'aurais déjà pu faire mieux : contacter plus de structures pour la diffuser, trouver de l'argent pour financer les résidences, faire un super teaser de la mort qui tue. Aujourd'hui, j'aurais sûrement plus de dates, d'opportunités. Mais ce n'est pas grave. J'ai fait comme je pouvais à un moment donné et c'est déjà énorme vis à vis de moi-même.

Evidemment, il y a ces ***** de doutes des "mais ma pièce est pas assez bien..." bla bla bla. Oui, c'est une première pièce. Elle est imparfaite. Je réalise que, sur le chemin, en confrontant ma création, j'apprends. Il y a à peine quelque jours, une personne qui va me programmer à Trouville-sur-Mer me disait qu'il avait accroché à mon écriture mais qu'il se questionnait sur la dramaturgie. Et donc ? Génial ! Un opportunité d'apprendre : je lui ai proposé que l'on puisse échanger là-dessus. Je vais lire ses pièces et comprendre sa vision de la dramaturgie, pour continuer à parfaire ma connaissance, mon art.

En tous cas, je réalise que, maintenant, je dois passer à la vitesse supérieure. Je dois tout donner, aller jusqu'au bout, jusqu'à ce que je puisse véritablement me reposer et me dire : "Tu as fait tout ce que tu as pu. Maintenant la suite est entre d'autres mains !"

Et pour moi le "je dois aller jusqu'au bout" signifie diffuser ma pièce dans toute la Suisse romande, autour de moi en Auvergne Rhône-Alpes et dans les endroits où j'ai des contacts : autour de Grenoble, en Normandie (avec mon épicentre dans la Ville du Trou), en Drôme, autour de Toulouse et en Ariège puis en Bretagne, où j'aimerais honorer toutes les belles personnes qui m'ont soutenu financièrement et avec leur amour. Qu'elles puissent enfin voir ma création !

Donc je vais tout faire pour ! Et la vie est tellement belle qu'elle m'a envoyée une chargée de diffusion pour m'emmener jouer vers la Loire, alors j'ai dit un grand ouiiiiii !!!!

C'est parti, baby !


Je ne m'arrêterai pas

tant que je n'aurai pas

tout donné !


Photos : Jérémy Guérard