Quel était le cadeau caché derrière ?
Quel était le cadeau caché derrière ?
Vendredi soir, je me suis replongée avec émotions dans mon aventure à l’Ecovillage de Pourges. A l'invitation d'un ami qui souhaiterait voir émerger des projets similaires en Haute-Savoie, nous avons décidé d'organiser une projection du film "En liberté" de mon ami Alex Ferrini. Le film retrace la 1ère année de l'installation du village. Comme c'était fort de revoir le film, les ami.e.s, le projet !!! Ce qui est tellement bizarre c'est cette différence entre l'impression que tout ceci n'était qu'un grand rêve et la sensation très vive de mes émotions associées. Je suis rarement dans la nostalgie (ou presque, des contre-exemples apparaissent direct dans ma tête ah ah ah!!! ).
Ma réalité est ce qui existe, maintenant, dans mon présent.
Tout le reste n'existe pas.
En même temps, je réalise que les émotions associées au passé sont hyper vivantes en moi, dans mon présent. Quelque chose m'a imprégnée, touchée, est maintenant inscrit dans ma chaire. Oui, je n'ai pas pu m'empêcher de pleurer en revoyant les ami.e.s, en revoyant notre couple, les étapes de construction de notre petite A-Frame. En me remémorant les souvenirs douloureux de la construire, pour ensuite la démonter. Après le film, il y avait un échange. Finalement, c'était plutôt des questions-réponses qui m'étaient adressées, alors j'ai répondu. Une des questions m'a été posée par mon amie Dany :
"Quel a été le cadeau derrière cette expérience ?"
Quelle question étonnante ! Toute l'expérience était un cadeau. Je ne regrette rien. Intégrer un projet à 1 million d'euros avec un projet de fou, sur une colline avec vue sur les Pyrénées, une piscine (mon mental d'écolo-rigide n'aurait jamais accepté une piscine alors que j'adore l'eau, merci l'univers !) !!! Quelques années avant, je n'aurais jamais pu croire que cela aurait été possible !!! Rencontrer des gens merveilleux, être au début d'un projet, pouvoir tout imaginer, rêver puis créer. Expérimenter la liberté d'être. La liste des cadeaux de cette expérience est immense ! J'ai pu passer deux ans à vivre un rêve que je mûrissais depuis longtemps. A la fac, j'animais une émission sur la décroissance, nous étions allés visiter des lieux, puis j'avais écrit des articles pour la Maison Écologique sur des écolieux au Danemark et en Irlande. Et, un jour, mes ami.e.s Benjamin et Elena, qui allaient rejoindre le projet de Pourgues nous ont demandé "Ça vous dit de venir ?". On a dit "oui". Que pouvions-nous faire d'autre ? Le projet nous ouvrait grand ses bras ! J'ai pu alors passer deux ans à expérimenter la vie en collectif, les conflits, les prises de décision, les résistances, les ouvertures, l'organisation, essayer un outil, l'abandonner, en essayer un autre, expérimenter, expérimenter. J'ai planté des tomates, tourné des bols en bois, porté les bébés des autres contre moi, partagé mon assiette avec eux (et mes microbes, j'ai pu faire ma coqueluche moi aussi , jeûné plusieurs fois, fait de la sculpture sur bois, construit deux yourtes en une semaine, fait la cuisine pour trente personnes, scié des planches à la main pour la construction de notre A-Frame, organisée une Guinguette. J'ai essayé, testé, pleuré, ri, j'ai été en colère, j'ai fait des rencontres merveilleuses. Le cadeau était immense. A un moment donné, j'ai réalisé que certaines choses que je fantasmais me procuraient un certain plaisir, mais pas total, car il y avait toujours une voix en moi qui disait "et après ?". Quand j'organisais la Guinguette, je ne voulais pas être l'organisatrice, je voulais être sur scène.
Notre A-Frame, how sweet home…
Le cadeau final a été donc de réaliser, un jour, sous la douche, après avoir suivi le programme de Julia Cameron "Libérez votre créativité", en pleurant "Mais, je veux faire du théâtre !!!". Alors je me suis lancée dans une formation à Toulouse. Je croyais que le théâtre et Pourgues iraient de paire, mais petit à petit j'ai senti que non. Je ne pouvais pas m'investir autant dans Pourgues que dans mes élans artistiques. En plus, nous ne pouvions pas laisser la A-Frame sur le terrain. L'expérience venait à sa fin.
Le plus beau cadeau pour moi est l'expérience.
Pour moi, la vie est un enchaînement de cadeaux, toujours plus beaux les uns que les autres. Accepter le cadeau demande du courage et du lâcher-prise. Réaliser qu'il fallait quitter Pourgues, démonter notre maison, construite avec amour, sans machines, pour laquelle nous avions tout choisi de A à Z, ne plus rien voir qu'un espace vide sur la colline, repartir en camion sans savoir où aller et se retrouver à squatter un camping, c'est dur. Sur le moment, je faisais pas la fière. Pourtant, depuis, tellement de cadeaux me sont parvenus !!! Passer le confinement au milieu des montagnes puis déménager dans une réserve de 500ha au milieu des animaux sauvages, pour finalement aujourd'hui me retrouver près d'un lac splendide avec un atelier artistique (L'Espace Enchanté) dans un lieu magique. Je ne peux que célébrer la vie et ses merveilleuses surprises ! Même si des fois, quand je ne sais pas comment je vais faire le prochain pas, je ne fais pas ma maligne (je pleure, je déprime, je flippe !!!), je réalise que tout est parfait. Merci la vie !
Vendredi, suite à cette projection, j'ai encore reçu des cadeaux. Une femme arrivée au moment où je partageais mon témoignage m'a dit "Je n'ai pas vu le film, mais j'ai l'impression d'avoir tout vécu intensément avec toi, tes émotions. Tu dégages quelque chose de sincère, sans masque.". Ça m'a tellement émue. Comme j'essaie d'être toujours plus en phase avec moi-même et les autres, sentir ce retour m'a beaucoup touchée. Si je peux transmettre une petite étincelle de quelque chose, je suis heureuse... Encore merci la vie. Je pleure.